Jeudi 28 novembre 1935 : L'enlévement de Claude Malmejac

 

PREMIERES RECHERCHES

VI

L'alerte est donnée

 
VII

Premières recherches

 
VIII

Premières auditions

 
IX

L’interrogatoire de la concierge

 



Remarques : Le compte-rendu du drame tel que vous le découvrez, est en fait la mise en écriture des témoignages de certains acteurs lors d’émissions diverses, des récits des témoins, des compte-rendu des journaux de l’époque, que ce soit les quotidiens nationaux comme le Petit-Parisien ou l’Intransigeant, pour ne citer que les principaux, ou la presse locale, le Petit Marseillais et le Petit Provençal en tête.

La plus grande partie de l’iconographie est issue des photos publiés par deux quotidiens connus pour leurs photos : Paris-Soir et l’Intransigeant. La mauvaise qualité de cette iconographie est due à l'utilisation du bélinographe, appareil de transmission des photos à distance par le biais du système téléphonique, appareil révolutionnaire pour l’époque et ancêtre du télécopieur.

Ce récit se veut être le plus proche possible des réactions humaines qu’ont eu les témoins et les acteurs du drame en ce jour tragique. Il se veut surtout être un texte à la mémoire des habitants de Marseille qui se sont tant inquiété du sort d'un enfant qu'il ne connaissait pas mais qui, pour eux, était avant tout un enfant de Marseille..

 

VI / L'alerte est donnée :


Université de Médecine

Université de Médecine de 1930 à 1959


La première chose que fait la mère éplorée est de prévenir son mari de la disparition du petit Claude. Le professeur Malmejac est agrégé de Physiologie à la Faculté de Médecine de Marseille.

Il est en pleine forme et il est en train de donner son cours lorsqu'il est prévenu par téléphone du drame. Abandonnant ses étudiants, il revient de toute urgence à son domicile où il trouve sa femme effondrée et sa bonne d’enfants affolée.


Après avoir écouté le récit de cette dernière, il prend les choses en mains. Accompagné de Georgette Perrachon, il se rend au commissariat du 17ème arrondissement où leurs dépositions sont recueillies par le Commissaire Giorgi.

Pour le commissaire Giorgi, il ne fait aucun doute que l'affaire est très sérieuse. Les deux témoins sont immédiatement, emmenés à l'Évêché, le commissariat principal de la ville, où ils sont accueillis puis de nouveau entendus par le chef de la Sûreté de Marseille, le Commissaire Couplet.

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VII / Premières recherches :


Le chef de la Sûreté appréhende tout de suite l'ampleur de l'affaire. Il se trouve aux prises avec un enlèvement d'enfant probablement pour des motifs criminels.

La première chose à faire est de lancer un bulletin d’alerte pour quadriller le plus rapidement possible la région et empêcher ainsi la ravisseuse de prendre la fuite. Elle sera alors obligée de se cacher dans un périmètre restreint par rapport au lieu de l’enlèvement, en l’occurrence la métropole marseillaise. Il commence donc par aviser tous les services de police existant en France, diffusant un premier câble annonçant la dramatique nouvelle. Ainsi, unités de police, brigades mobiles, gendarmeries de tout l’hexagone se retrouvent mis en état d’alerte.


"Un bambin de dix huit mois a été enlevé à Marseille. Une vieille femme de soixante à soixante dix ans est l'auteur de ce rapt."



Une fois cette mise en alerte effectuée, il faut donner le renseignement le plus précis possible de l’enfant enlevé. C’est le but de ce deuxième câble diffusé une vingtaine de minutes plus tard.

Signalement de Claude Malmejac

Enfant âgé de dix-huit mois
Plutôt grassouillet avec un furoncle à la jambe gauche en pleine évolution
Cheveux blond, non frisés
Yeux bleus
Vêtu d'une combinaison en laine bleue avec une veste assortie
Coiffé d'un bonnet blanc agrémenté de fourrure en angora
Chaussé de souliers blancs avec des guêtres blanches
Il porte une médaille de piété et une chaîne avec une plaque d'identité.

Le landau est une voiture de couleur grise aux formes modernes dites
aérodynamiques avec des filets blancs


Enfin, un troisième câble parle de la ravisseuse. Il s’agit cette fois-ci de son signalement avec, comme on peut le constater, un maximum de détails. Toutefois, ce signalement demeure très vague et peut correspondre à toute femme âgée d’une soixantaine d’années portant des lunettes et ayant des difficultés à marcher.

Signalement de la ravisseuse

Age : Soixante / Soixante dix ans
Taille : petite
Cheveux : Blanc
Corpulence proportionnée à la taille
Vêtue d'un long manteau noir et coiffée d'une toque de même couleur
Porte des lunettes à verre ordinaire
Boite légèrement de la jambe gauche et s'aide d'une canne d'infirme


Les forces de police prévenues, l’enquête au sens propre du terme peut enfin commencer. Pour les enquêteurs, la première chose à faire est de retrouver le taxi. En effet, ce taxi est la seule piste existante et le retrouver permettra de se faire une première idée de cette affaire. A ce stade, trois hypothèses peuvent être avancées concernant ce taxi :

  • Le chauffeur de taxi est innocent. Il a convoyé en toute innocence l'inconnue, il est probable que la police devra orienter ses recherches sur la piste des malades mentaux.
  • Le chauffeur de taxi est au contraire complice de la ravisseuse. La police se retrouve en présence d'un gang et la piste de la pègre doit être développée.
  • Le taxi n’existe pas. Le témoignage de la nurse est alors caduc et elle devient le suspect numéro un dans cette histoire

Dans les deux premiers cas, retrouver le chauffeur de taxi permettra d’orienter l’enquête et surtout de savoir où la ravisseuse s’est rendue, une fois son forfait accompli. Les policiers partent donc à la chasse au taxi vert, deux inspecteurs étant plus particulièrement chargés de l'inspection des dépôts de taxi.

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VIII / Premières auditions :


Parallèlement à ces premières recherches, le professeur Malmejac et la jeune Georgette Perrachon sont de nouveau longuement entendus par les inspecteurs de la Sûreté dans les locaux de l'Évêché.


Interrogatoire Mlle Perrachon

Comme on peut le constater, les interrogatoires de la police sont ouverts à la Presse !


Georgette Perrachon, une jeune fille alerte de seize ans, est depuis le mois de mai en charge du petit Claude. Au fil des semaines, elle a appris à aimer cet enfant. Le récit qu'elle fait aux policiers et plus particulièrement à l’inspecteur Martini, est identique au récit qu'elle a fait au Commissaire Giorgi. Elle précise de surcroît que :

"Je ne pouvais pas me méfier de cette femme mise avec élégance. Son age m'a inspiré confiance. D'ailleurs, ses déclarations étaient plus que vraisemblables d'autant plus que je l'avais remarquée la veille lorsque, étant venu visiter un appartement libre dans l'immeuble de mes patrons, elle m'avait dévisagée avec insistance."

Cette deuxième audition permet aussi aux inspecteurs d’affiner leurs recherches. Ils s’intéressent plus particulièrement aux détails, principalement à ceux concernant le signalement de la ravisseuse. Mais ils n’omettent pas non plus les autres détails, ceux qui peuvent avoir une importance primordiale pour l'enquête.


Ainsi, parmi les précisions qu’elle donne aux hommes de l’inspecteur-chef Martini, on trouve une description détaillée du taxi dans lequel elle est montée : c'était un véhicule de couleur verte, une conduite intérieure, au siège recouvert de velours à côte de couleurs beige. Le chauffeur possédait une casquette marron, c'est le seul détail dont elle se souvient concernant cet homme.

 Autre détail dont se souvient la nurse et qui se révèle avoir une importance primordiale: Le compteur du taxi indiquait quatre francs cinquante lors de l'arrivée au boulevard Perrier. Or, c'est le prix de la course Parc Chanot/Boulevard Perrier. L'inconnue a donc hélé le taxi à proximité du Parc Chanot.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que plusieurs objets sont aussi restés dans le taxi :

  • Le landau de l'enfant, aux formes aérodynamiques peinte en bleu gris.
  • Un sac de toile avec les jouets du petit Claude.
  • Le sac à main de la jeune femme contenant vingt francs.
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IX/ L’interrogatoire de la concierge :


Les déclarations de la nurse conduisent les enquêteurs à interroger la concierge du 185 avenue du Prado, Madame Lombardi. Ses déclarations confirment les affirmations de la jeune fille. La vieille femme est bel et bien passée la veille dans l'immeuble. Elle était à la recherche d'un appartement à louer. En effet, elle a bien croisé la nurse qui ramenait le bébé de promenade.

Mme Lombardi explique longuement aux inspecteurs qu’une femme en noir, correspondant au signalement de l'auteur du rapt, s'est présentée à elle le 27 après-midi. Elle l’a abordé en lui  déclarant : "Je viens de la part de M. Tassy, gérant de l'immeuble, pour louer un appartement." Cela ne choqua pas la concierge car l'immeuble, de construction récente, possède plusieurs appartements encore vacants. De plus, le gérant, M. Tassy, l’a prié de faire visiter les appartements aux locataires potentiels. Elle lui demanda alors si elle désirait l'appartement au premier ou au deuxième étage. La vieille femme se contenta de répondre, avec un grand sourire : "Je veux un appartement à huit mille francs !"  La concierge  lui fit alors visiter le local disponible du deuxième étage.

L'appartement eut l'air de convenir à l'inconnue. En descendant l'escalier, elles croisèrent Georgette Perrachon qui s'apprêtait à monter dans l'ascenseur en compagnie du petit Claude. La concierge lui souhaita le bonjour mais elle s'aperçut que la femme en noir regardait attentivement la nurse. "Je me rappelle qu'elle dévisagea longuement le bébé mais rien de surprenant à cela car l'enfant est si joli qu'il attire tous les regards !"

La visiteuse prit ensuite congé en lui disant : "L'appartement me plait. Je serais votre locataire. Une seule chose me déplait, la couleur des carreaux de la cuisine. Je passerai voir M. Tassy pour fixer le prix définitif."

Contacté à son tour, le gérant de l'immeuble, M. Tassy, ne confirmera rien du tout. L’inconnue ne s’était jamais présentée à son bureau pour louer un quelconque appartement. Les appartements vides situés au 185 avenue du Prado sont toujours disponibles.

Après ces deux auditions, il ne fait aucun doute aux inspecteurs que la ravisseuse avait obtenu les renseignements dont elle avait besoin pour abuser la concierge, en regardant simplement la pancarte apposée sur la grille en fer forgé bouclant l'accès de l'immeuble :


"Appartement à louer
Voir Mr Tassy, 51 rue Paradis"


Tandis que les policiers font les premières investigations, la station radiophonique "Marseille-Provence" diffuse à son tour la nouvelle, propageant une onde de choc au sein de la population marseillaise.

Jamais un tel événement ne s'est déroulé en France et encore moins à Marseille. Pour tous les Marseillais, ce ne peut-être que des étrangers à la ville qui ont commis un tel forfait. C'est un procédé digne des Américains !

   
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Jeudi 28 novembre 1935
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